25 Août 2009 Par Lamia Oualalou
Le Rio Grande do Sul se targue d’une tradition « européenne », nourrie par ses descendants d’Allemands, d’Italiens et autres Européens de l’Est. C’est aussi, du fait de sa richesse agricole, une des terres les plus meurtrières pour les dirigeants des mouvements sociaux, en particulier le Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST). La confrontation entre les autorités locales, qui sont le plus souvent liées (pour ne pas dire désignées ou achetées) aux grands propriétaires de latifundio de l’Etat. Mais depuis l’élection de Yeda Crusius à la tête de l’Etat en 2006, la criminalisation des mouvements sociaux est devenue une politique assumée.
Le MST vient d’en faire une nouvelle fois l’amère expérience avec l’exécution de Elton Brum, un agriculteur de 44 ans père de deux enfants. Avec plusieurs autres compagnons, ils occupaient la Fazenda Southall, à São Gabriel. C’est la brigade militaire du Rio Grande do Sul, sous les ordres de Yeda, qui a provoqué sa mort, blessant des dizaines d’autres personnes, dont des femmes et des enfants. Comme à l’accoutumée, la Brigade militaire a prétendu la légitime défense face à des militants présentés au reste du Brésil comme des sauvages. Mais le MST vient de diffuser les photos du corps d’Elton Brum, prises à l’hôpital. Il a été tué de tirs dans le dos, provenant d’une carabine à proximité du corps. Tous les indices d’une exécution.
Yeda Crusius, par ailleurs poursuivie pour corruption, a réhabilité des textes de la dictature, en particulier celui de faire suivre et mettre sous écoute des leaders de mouvements sociaux nom de la loi de « sécurité nationale ». C’est une violation de la constitution. A ce titre le MST est poursuivi par la justice comme s’il s’agissait d’une organisation paramilitaire rappelant qu’il était impossible d’assimiler les sans-terre à des terroristes. Mais le Brésil est un pays fédéral, y compris sur les questions judiciaires. Toutes les réunions des militants sont dispersées, et plusieurs de leurs campements ont été détruits par la police militaire, laissant des centaines de familles sans ressources. L’Etat a également ordonné la fermeture de leurs écoles, estimant que les enfants des sans terre devaient se rendre dans les mêmes établissements publics que tous les autres. Etant données les distances et l’absence de moyens de transport, cela signifie priver ces enfants d’accès à l’enseignement.
Le MST est aujourd’hui le principal critique de la présence des multinationales dans l’agriculture violant plusieurs lois et imposant la monoculture. Ces entreprises, qui ont contribué au financement de la campagne de Yeda Crusius, font la pluie et le beau temps dans le système judiciaire local. Plusieurs autres états sont tentés de criminaliser de la sorte les militants en faveurs des droits sociaux. Le MST tire la sonnette d’alarme, pour que Elton et les autres ne soient pas morts pour rien.
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